Un Témoin en Guyane, écrivain - le blog officiel

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C'EST UN BEAU ROMAN...

28/01/2013

Vous aimez les belles histoires ?

 

Si oui, je vous offre quelques lignes du début de mon roman Petit-Noyau dans le courant du fleuve. Quelques-un(e)s d'entre vous m'ont dit avoir été touchés par l'amoureux combat de La Voix et de La Pluie. Alors, voilà...

 

11-03-07 038 copie-copie-1Elle revenait de l'abattis lorsqu'elle le vit. Le jeune homme était magnifiquement découplé. Sa peau brillait sous le soleil et les minuscules gouttelettes de sueur perlant de son visage et de ses pectoraux superbement dessinés lui envoyaient des reflets mauves, comme autant d'appels chargés de sensualité. Elle s'arrêta sur place, son panier de dachines posé sur la tête, confondue à tel point qu'aucun son ne pouvait plus franchir le rempart de ses lèvres. Ils restèrent ainsi immobiles, elle à l'ombre du layon, lui sous le soleil, sans qu'aucun d'eux parvienne tout d'abord à envoyer la parole à l'autre. Après une éternité d'immobilité, de regards croisés-mêlés, Roniel cependant lui avait parlé :

« - Petit fruit pomme-cannelle, lança-t-il, tu attends que je vienne respirer vers toi, mais es-tu mûre à souhait ?

- Jamais on n'a vu de bon fruit sur une branche sèche », avait-elle répondu avec juste ce qu'il fallait de canaillerie, aux coins de sa bouche comme dans ses yeux rieurs. Il avait ri aux éclats et elle en avait été émue, tant il semblait lui envoyer de lumière. Rien d'étonnant alors, dans les jours suivant la cérémonie de remise du pangi, à ce qu'une tante du jeune homme soit allée trouver l'Ancienne, la maman de Merlien, pour proposer une union entre les deux lignées. Cela fut accompli au cours d'une fête qui reste en bonne place dans la mémoire des anciens qui sont encore sur terre pour l'évoquer.

Mais les esprits qui rôdent sur le fleuve avaient sans doute décidé qu'une vie passée ensemble était un cadeau trop opulent pour les deux amants. Le temps d'une saison étant passé, l'abattis défriché offrait ses premières racines de manioc et le carbet des jeunes gens avait vu s'écouler assez de nuits pour que le ventre de ma grand-mère commençât à se tendre. C'est à ce moment que Roniel lui annonça un matin qu'il devait aller aider un ami de son oncle à fabriquer une pirogue, plus haut sur le fleuve. Il en profiterait pour aller saluer sa famille à Tabiki, une île toute en longueur sur le Tapanahoni, en plein pays Ndjuka. Il était notoire qu'il avait une autre épouse là-bas, mais les étoiles dont il environnait les nuits de Merlien suffisaient à l'empêcher de penser trop à l'absence à venir...

Et l'absence vint...

 



28/01/2013
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