QUE FUIENT LES BRÉSILIENS QUAND ILS VIENNENT EN GUYANE ?
11/11/2014
Un fait divers, source : http://www.brasilyane.com/
http://www.amnestyinternational.be/
Un peu d'histoire, source : http://www.risal.info/spip.php?article113
Au moins neuf personnes tuées en une nuit
Un policier militaire a été abattu mardi vers 19h30 dans le quartier de Guamá, alors qu'il rentrait chez lui.
Alors que des rumeurs de « massacre » couraient les réseaux sociaux, neuf personnes étaient abattues par des hommes casqués à moto dans différents quartiers : quatre dans le quartier pauvre et chaud de Terra Firme, proche de celui du Guama, les autres dans cinq quartiers périphériques différents.
Amnesty international réclame une enquête
Bien que de forts soupçons de représailles policières flottent, les autorités se refusent officiellement à privilégier cette piste plutôt qu'une autre pour l'instant. L'info fait le tour des médias nationaux brésiliens. Amnesty International réclame ce soir (5 novembre, lendemain des meurtres, NdTémoin), une enquête indépendante immédiate sur ces faits. Selon certains témoignages, les quartiers concernés par les exécutions auraient été bouclés par des véhicules de la police militaire au moment des crimes. Selon Amnesty (et des témoins), les exécutions auraient été organisés en utilisant les réseaux sociaux.
Au moins neuf personnes ont été tuées le 4 novembre dernier, apparemment par des agents de la police militaire qui n’étaient pas en service, à Belém, dans l’État du Pará (nord du pays). Les témoignages des résidents indiquent que le nombre de morts pourrait être plus beaucoup plus élevé que celui annoncé par les autorités. Il semble que ces homicides aient été commis en représailles après la mort par balle d’un policier.
Le 5 novembre 2014, les autorités de l’État du Pará, dans le nord du Brésil, ont officiellement confirmé que neuf personnes avaient été tuées dans les quartiers de Guamá, Terra Firme, Marco, Jurunas et Sideral, à Belém, la capitale de l’État. Les habitants de ces quartiers et des organisations locales de la société civile affirment que ces événements sont le fait d’agents de la police militaire. Les premiers meurtres ont eu lieu dans la nuit du 4 novembre, après qu’un agent de la police militaire qui n’était pas en service a été abattu dans la soirée, au moment où il est arrivé chez lui, à Guamá. On ignore actuellement les circonstances de cet homicide, sur lequel les autorités sont en train d’enquêter. Peu après, plusieurs agents de la Patrouille visible tactique métropolitaine (ROTAM) – une unité spéciale de la police militaire de l’État – ont publié des messages sur les réseaux sociaux, incitant leurs collègues à se venger. Sur la page Facebook de la ROTAM (qui a été vidée depuis, je l'ai vérifié NdTémoin), il était marqué : « La chasse a commencé... faites attention les vagabonds... la ROTAM a du sang dans les yeux. »
Les résidents de Terra Firme ont confié à Amnesty International que des véhicules de la police militaire bloquaient les rues autour de la zone, les empêchant d’en sortir. Ils ont également signalé avoir vu au moins deux voitures non immatriculées et cinq motos rouler dans le quartier. Les témoins racontent que les hommes conduisant ces véhicules portaient des cagoules et étaient lourdement armés, et qu’ils ont menacé et attaqué des habitants. Les résidents des cinq quartiers concernés affirment que le nombre de personnes tuées dans la nuit du 4 novembre est bien plus élevé que celui annoncé par les autorités. Le médiateur de la sécurité publique et de la police et plusieurs organisations locales de défense des droits humains continuent de recueillir des informations quant au nombre exact et à l’identité des victimes, ainsi qu’aux circonstances de chacun de ces homicides. Les habitants craignent toujours pour leur sécurité.
Le colonel Pantoja et les autres officiers ont accusé le gouverneur Almir Gabriel, le secrétaire à la Sécurité et le commandant de la Police Militaire (PM) de l’époque, qui, par précaution ont été retirés avant le procès. Malgré les efforts du Ministère Public, parmi les 12 officiers jugés, seulement le colonel Pantoja et le major Oliveira ont été condamnés. Les autres ont été relâchés. Même condamnés - 228 ans pour le colonel Pantoja et 158 pour le major Oliveira - ceux-ci n’ont reçu que la peine minimum pour chaque assassinat (12 ans pour Pantoja et 8 pour Oliveira). Ils pourront faire appel en liberté et, s’ils perdent, ils auront plus de 65 ans, et obtiendront alors des aides de l’institution militaire. Les autres officiers ont fait reporter la responsabilité sur Pantoja et ont été innocentés.
La société brésilienne devra continuer à faire pression pour que ces jugements soient annulés et pour que tous les coupables de ce massacre soient condamnés...
Acte I
Depuis la défaite des cabanos [mouvement de révolte au XIX° siècle des habitants pauvres des cabanes au bord des rivières contre les élites régionales], les oligarchies de l’état du Pará, alliées au capital étranger à qui elles bradent "à prix de banane" les richesses nationales, étaient habituées à la même méthode de résolution des "problèmes sociaux". Elles laissaient les pauvres entrer dans les immenses extensions de terres publiques de l’état pour qu’ils les travaillent et plantent pour manger. Ensuite elles arrivaient avec les titres de propriété obtenus facilement dans leurs propres bureaux. Puis elles expulsaient tout le monde, avec l’aide de pistoleiros. Pour ceux qui osaient résister, le prix était la mort. Ainsi, seulement dans les années 80, ont été assassinés plus de 460 leaders paysans, syndicalistes et religieux (d’après la CPT, Commission Pastorale de la Terre). Et les paysans expulsés se voyaient obligés de recommencer plus loin, travailler de nouvelles terres, fuire de nouveau, et continuer vivants. Après leur départ, le bois était coupé et exporté vers l’Europe et les terres laissées au bétail. Elles pouvaient même utiliser les ressources publiques fédérales pour faire tout ça. Beaucoup de riches sudistes, entreprises et même artistes sont allés lá-bas, pour suivre le modèle.
Acte II
Dans les années 90, les paysans de la région de Marabá ont commencé à s’organiser dans le MST et à utiliser d’autres méthodes. Grosses occupations avec toute la famille, organisation communautaire, culture de produits résistants, organisation à l’intérieur des terres et prise de conscience de leurs droits. Les pistolets des hommes de main n’ont pas fonctionné contre le MST. L’appareil militaire (la PM) a alors été mis au service de la grande propriété. Et en avril 1996, quand plus de 1000 travailleurs, hommes, femmes et enfants, se sont résolus à marcher durant des centaines de kilomètres, de Paraupebas à Belém, pour revendiquer leur droit à la terre dans une région de grandes propriétés, lá c’était trop ! Il fallait donner une leçon et « en finir une bonne fois pour toutes avec le MST ! », criaient les élites. Les policiers furent alors incités à en finir avec le désordre, "coûte que coûte". Ils sont sortis des casernes, sans identification sur leurs uniformes et leurs armes, et chargés de munitions. Ils ont fait leur travail. Ils ont encerclé les paysans avec deux bataillons, un de chaque côté de la gare routière, pour éviter toute fuite. Ils ont commencé par assassiner un paysan sourd-muet, qui, ne comprenant pas la tragédie annoncée, s’approchait de la troupe. Puis ils se sont lâchés, comme des fauves. Résultat : 19 morts et des dizaines de blessés. Parmi eux, 9 ont été assassinés à bout portant et avec des armes blanches, ce qui signifie qu’ils ont été immobilisés puis ensuite éxécutés. Le leader, Oziel Pereira, avec ses 19 ans de révolte, fut mis à genoux et, devant tout le monde, éxécuté avec un tir dans la nuque, après avoir été obligé de crier « Vive le MST ! », fait rapporté lors du procès par le chauffeur du bus utilisé par la PM.
Acte III
La société brésilienne fut choquée. Oscar Niemeyer a fait part de son indignation dans un monument à Marabá : il a été détruit par l’UDR (Union Démocratique Ruraliste, association des grands propriétaires terriens). Le MST a organisé une marche en avril 1997 pour demander justice. A l’arrivée à Brasilia, il y avait plus de 100 000 manifestants de tout le pays. Le gouvernement de Fernando Henrique Cardoso, honteux, promit d’emmener l’affaire en Justice Fédérale et mit en route un projet de loi qui traîne dans le Congrès jusqu’à aujourd’hui.
Acte IV
Mais la classe dominante du Pará ne baisse pas les bras. Représentée dans le gouvernement étatal, dans le Pouvoir Judiciaire, dans la Police Militaire, elle a poursuivi son entreprise haineuse. Elle a fait en sorte d’avoir un long procès, « pour que cela ne donne rien ! ». Et, malheureusement, jusqu’à maintenant, elle a réussi. Les défenseurs des droits de l’homme, la CPT, et la population du Pará savaient que, si le jugement n’était pas transféré au niveau fédéral, il y aurait difficilement punition des coupables !
Acte V
Un jour, les voix des cabanos se lèveront et la terre sera [partagée] ! Prenez note.
Traduit librement par Jorge de l’article « Carajas »
de João Pedro Stedile, in revue Caros Amigos, 2002
Mais que fuient donc les Brésiliens qui viennent en Guyane ?
Pour en savoir plus sur le mouvement des Sans-terre du Brésil :
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