DE MANAUS À BELEM SUR L'AMAZONE (5)
31/08/2013
Cinq jours et quatre nuits sur le Fleuve-roi
Qui n'a pas fréquenté l'Amazone passe à côté de son rêve
Nous avons reçu, hier soir, comme un cadeau merveilleux, l'un des plus beaux crépuscules qu'il nous ait été donné d'admirer (voir l'article).
Encore une nuit coupée d'arrêts dans des lieux improbables, souvent un entrepôt entouré d'un ou deux bars où des portefaix caboclos patientent en attendant le bateau qu'ils devront, pour quelques reais, décharger et recharger en un temps record. C'est au cours d'une de ces haltes que nous avons vu, traversant les lumières brunes de la nuit, les plus grosses chauve-souris de notre vie (l'envergure d'une poule, pour certaines). Fascination.
Un nouveau petit matin nous surprend et nous fait lever, pour le plaisir de la contemplation et de la rêverie, bien avant que Domingo ait lancé à tue-tête son habituel "Bom dia, café da manha, café da manha, bom dia, bom dia !"
Et la vie comme le fleuve continuent leurs cours respectifs, jamais interrompus, comme confondus...
Nous sommes à présent à 24 heures de notre arrivée à Belém. Tout au long de la journée va se dérouler un rituel que nous allons découvrir, lourd de rencontres, d'expériences et d'enseignements.
Il est presque midi lorsqu'un esquif léger, genre wiliboto s'approche du Nello Correa.
Puis un autre, un autre encore... Tour au long de la journée notre gros bateau poursuivra sa navigation au milieu de ces petites barques, sans ralentir et sans dévier.
Nous pensons rêver : au milieu de ce fleuve large comme une mer, s'activent, s'approchent de petites embarcations dont le bord dépasse le niveau de l'eau seulement d'une dizaine de centimètres, toutes peuplées exclusivement de jeunes garçon dont l'âge se situe en moyenne entre 5 et 10-12 ans...
La raison de tout cela ?
Ces gamins viennent gagner leur vie, tout simplement. Ils placent leur barque devant le gros bateau, au plus juste pour ne pas se faire éperonner, ils crochètent et...
Hop !
Ils grimpent à bord !
Quel âge vous lui donnez ?
Ils montent pour vendre des bricoles, des fruits sauvages ou de leur abattis, des crevettes du fleuve. Ils ont tous, dans leur petit bateau, un bidon qu'ils feront emplir de carburant à bord du Nello Correa. Sans doute pour alimenter leurs groupes électrogènes... Ils paieront avec l'argent gagné par la vente de leurs fruits.
Et celui-là ? quel âge a-t-il donc ?
Et cela continue, toute la journée. Des gamins, des gamins, des têtes nouvelles, qui viennent nous présenter qui des bacoves, qui des bananes, qui des ingas, qui des crevettes, parfois du poissons... Tout d'abord craintifs pour eux (un passager brésilien nous dira que, de temps à autre, un tribut de jeune chair est payé aux hélices), puis admiratifs, puis soucieux et curieux de mieux connaître leur vie, nous essayons d'entrer en communication. Mes notions de portugais étant rudimentaires, parfois seul un sourire me répond. Et puis... Nous ne pouvons tout de même pas acheter de dizaines de kilos de fruits ou de crevettes...
Parfois, l'imprévu vient s'immiscer dans une réalité dure et quotidienne, certes, mais bien rôdée, cependant.
Ici les deux frères n'arrivent pas à détacher leur barque dont la corde s'est emmêlée. Après une demi-heure d'essais infructueux, la décision est prise : l'un d'eux reste à bord, démêle le noeud gordien et détache l'embarcation dans laquelle son frère est resté. Celui-ci s'écarte de la route de notre navire, puis le garçon qui est resté saute à l'eau, le plus loin possible (les hélices !). Son frère l'aide à grimper à leur petit bord. Ils repartent dans l'autre sens, et nous pensons avec horreur à tous ces kilomètres qu'ils ont parcourus avec nous et qu'ils doivent refaire dans l'autre sens, ramant à contre courant...
Adieu, les gosses du fleuve, vous faites la nique au danger en le méprisant... Adeus !
En fin d'après-midi les barques ont presque toutes disparu, comme des abeilles retournées à la ruche. L'explication : le grain qui se prépare. Regardez :
Il est temps de rabattre les bâches latérales du bateau avant que les hamacs soient trempés...
Et la vie des « enfermés » s'organise...
Parfois des couples se forment...
Là, ça recommence. Décidément, c'est trop de bonheur...
Il en reste un ? Non, non. Celui-là est venu pour raccompagner un passager qui avait oublié l'heure de remonter à bord après une de ces multiples escales de chargement/chargement. Notre bateau s'est engagé dans un autre bras du fleuve pour aller chercher le retardataire, qui a pu embarquer sous les rires et les vivats des autres passagers. Puis le Nello Correa a fait une manœuvre pour rejoindre tranquillement sa route normale. Une bonne leçon de vie collective... Imaginons, dans l'Hexagone, un train aiguillé vers une autre gare, même un car faisant un crochet par un village non prévu sur son itinéraire pour prendre un retardataire... Allons... l'Utopie n'est pas en Europe occidentale... Boa Noite !
Demain nous devrions arriver à Belém, notre destination.
à suivre...
Toutes les images du voyage, intégralement, dans l'album-photos
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