Un Témoin en Guyane, écrivain - le blog officiel

Un Témoin en Guyane, écrivain - le blog officiel

LA MORT D'UN FLEUVE

24-09-2023

 

Les conséquences de la pollution du fleuve

 

image1.jpgSoit c'est rouge, soit c'est jaune…

 

Ancien et indifférent aux frontières, l’impact de l’orpaillage illégal est, par nature, difficile à quantifier. Selon la Fedomg (Fédération des opérateurs miniers de Guyane), 90 % de la production d’or en Guyane serait le fait d’une activité clandestine en forêt. Elle correspondrait à une production comprise entre 10 et 15 tonnes d’or par an, pour un chiffre d’affaires de l’ordre de 600 millions d’euros, et serait le fait d'environ 15 000 travailleurs clandestins. Les activités d’orpaillage d’illégal sont, dans leur immense majorité, le fait de garimpeiros, ressortissants brésiliens présents en France de manière illégale. Ces activités irrégulières se sont surtout développé « dans les zones où l’activité minière est interdite ou strictement limitée ».
On peut  aisément contrer cette assertion de la Fedomg au vu du nombre de plaintes déposées par celle-ci selon lesquelles les placers dits « légaux » seraient les proies favorites des pillages menés par les orpailleurs clandestins.

le Conseil Scientifique du Parc amazonien de Guyane (PaG) a alerté à de multiples reprises les pouvoirs publics sur la situation catastrophique de l'orpaillage illegal sur le territoire concerné par celui-ci et notamment ses conséquences environnementales, sanitaires, sociales et de sécurité publique.

 

_pollution-guyane.jpg

De récentes missions scientifiques effectuées sur le Maroni, transfrontalier entre la Guyane française et le Suriname, ont permis de constater une aggravation alarmante de l‘état de pollution des eaux (en particulier la pollution sédimentaire) avec des eaux extrêmement turbides induisant d’importants dépôts de sédiments sur les substrats et les végétaux aquatiques provoquant ainsi une asphyxie des habitats de la faune aquatique et une partie importante des premiers maillons de la chaine trophique. Cette pollution aiguë, qui peut être observée sur l‘ensemble du bassin, depuis Antecume-Pata jusqu'à |'embouchure du fleuve, explique fort probablement sur certains secteurs, notamment les Abattis Cottica, la diminution très significative du nombre d‘espèces de poissons observées et du nombre de captures comparées a d‘autres fleuves moins impactés comme l'Approuague, par exemple. Certaines espèces-clés pour l'alimentation humaine (acoupas, torches, aïmaras, pakous...) se sont par ailleurs révélées absentes ou rares dans les échantillonnages réalisés. Ces observations, couplées à la raréfaction constatée des oiseaux piscivores le long des berges, révèlent des atteintes importantes des groupes de poissons, a minima sur certains secteurs du Maroni, mais sans doute plus globalement que la diversité et la quantité des poissons ont dramatiquement baissé sur le Maroni sous la pression de l'orpaillage. 

les-bouteilles-en-plastique-sont-de-loin-les-dechets-qui-polluent-le-plus.jpgL'on ne peut donc que constater que l‘état désastreux des eaux du Maroni conduit à une extrême précarisation des relations qu‘ont les communautés locales du haut Maroni avec leur environnement aquatique, que ce soit en termes de ressources alimentaires issues de la pêche, ou sur le plan sanitaire. Dans certains villages amérindiens, on ne peut plus se permettre de boire l’eau issue directement ou indirectement de la rivière et se tournent vers l'eau minérale conditionnée en bouteilles en plastique, ce qui accroit les pollutions déjà criantes sur le fleuve. Cette situation, couplée à d'autres facteurs sociaux, induit dans ces communautés locales un très fort sentiment d'abandon par les autorités françaises dont la mission est − normalement − de garantir les conditions nécessaires à leur sécurité, à leur santé et à leur bien-être.
La colère des Amérindiens monte. Si la lutte contre l'orpaillage illégal en Guyane passe par le recrutement plus massif de forces armées, on voit bien que, depuis des années, cela ne suffit pas à endiguer la prolifération des sites  toujours plus nombreux. Cela passe avant tout par la saisie de mercure, un métal toxique indispensable pour les chercheurs d'or. Mais s'ils ne peuvent plus en acheter sur le territoire français, il leur suffit, pour s'en procurer, de se rendre au Suriname en traversant le Maroni. L'expérience montre qu'il est très facile d'en acheter dans le pays voisin.
phpxB7Hi6_1.jpgLes efforts déployés par la République française dans la lutte contre l'orpaillage illégal, pour réduire les impacts environnementaux et leurs conséquences envers des communautés vivant sur les rives du Maroni pourraient se voir lourdement compromis par les activités aurifères surinamaises en pleine expansion. L'intégrité écologique et hydro-morphologique du Maroni, mais également le bien-être des communautés locales dont les conditions d’existence sont menacées à court terme, sont aujourd’hui clairement mises en péril par les activités menées sur le sol surinamais.
C'est ce sur quoi intervient le Conseil Scientifique du Parc, c'est aussi ce qui alimente de plus en plus fortement la colère des Amérindiens sur la nécessité de traiter de toute urgence cette problématique transfrontalière qui impacte fortement aujourd’hui l'intégrité sociale et environnementale du territoire
Afin que leur colère ne génère pas des furoncles sur la face de la France...
OKwadjani

 

  Retrouvez bientôt la prochaine chronique d’Olson sur Un Témoin en Guyane

 



05/10/2023
1 Poster un commentaire

A découvrir aussi


Inscrivez-vous au site

Soyez prévenu par email des prochaines mises à jour

Rejoignez les 92 autres membres